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Serres : optimiser pour dépenser moins d'énergie

Le ballon de stockage d'eau chaude permet le découplage de la production de chaleur et de la satisfaction des besoins en chaleur de la serre. L'open-buffer ou stockage au centre va plus loin en permettant un fonctionnement de la chaudière à régime constant.

La chaufferie n'est pas le seul levier permettant de diminuer les coûts de chauffage de la serre. Différentes solutions d'optimisation peuvent être mises en oeuvre : mieux isoler, diminuer les consignes de températures, chauffer au plus près des plantes... Cet article en rappelle quelques-unes accompagnées de l'exemple des actions menées dans les serres municipales d'Aix-les-Bains (73).

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«Le poste énergie représente en moyenne 11 % des charges de production directes » des serristes horticoles, rappelait Claude Déhais, président d'Astredhor, à l'occasion d'une journée technique organisée par l'institut technique au mois de janvier, à Rungis (94). Outre des retours d'expérience de producteurs, des interventions de spécialistes ont permis de détailler des thématiques comme la cogénération ou l'énergétique des serres.

Ainsi, Raphaël Tisiot, ingénieur au pôle Serre du Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes (CTIFL), a dressé le panorama des leviers possibles d'optimisation de l'énergie. La majorité du parc dépendant encore des énergies fossiles (le gaz naturel et le fioul domestique principalement), des marges de manoeuvre existent. Elles sont souvent mises en évidence par la réalisation d'un audit énergétique. Outre le changement d'énergie, différents leviers d'action permettent de diminuer la consommation énergétique, avec des résultats et des retours sur investissement variables.

1. DIMINUER LES CONSIGNES DE TEMPÉRATURES. Astredhor a mené des recherches pour optimiser la conduite des cultures à basse température : « Une baisse de 1 °C de la consigne de température permet de réaliser une économie d'énergie de près de 13 % en cultures de plantes ornementales », souligne Claude Déhais. « Nos expérimentations portent dans ce cadre sur l'adaptation de l'itinéraire de culture, la maîtrise de la durée d'enracinement ou encore la date de floraison. D'autres études ont également utilisé l'intégration des températures en raisonnant à partir d'une température moyenne sur 24 heures. » Ainsi, l'augmentation du confinement de jour permet de compenser les baisses de température de nuit. Il est alors important de gérer correctement la phase de relance matinale pour éviter les phénomènes de condensation sur les plantes. Le module d'intégration de température installé sur un ordinateur climatique est éligible au dispositif des certificats d'économie d'énergie - CEE (1). Ces solutions nécessitent par ailleurs de bien choisir les variétés mises en culture. Elles peuvent entraîner 10 à 20 % d'économie d'énergie, selon les estimations du CTIFL (2).

2. GESTION DE L'HUMIDITÉ. L'augmentation du confinement de jour pour compenser les baisses de température de nuit et l'évolution vers des serres de plus en plus étanches (serre fermée ou semi-fermée) impliquent de gérer le chauffage (basse température) et l'humidité en serre. La gestion traditionnelle (chauffage et aération) représente 20 à 30 % de la facture énergétique. Le recours à des déshumidificateurs thermodynamiques (éligibles au CEE) peut permettre d'économiser 15 % d'énergie avec un retour sur investissement sur 5 ans.

3. LIMITER LES DÉPERDITIONS THERMIQUES. Les besoins énergétiques d'une serre polyéthylène sont près de deux à quatre fois supérieurs à ceux d'une double paroi plastique. Entre les deux se situent la serre verre et la serre verre associée à un écran. Le maximum d'isolation est atteint avec un abri triple paroi plastique. Les déperditions thermiques varient selon les matériaux de 100 kWh/m2/an à près de 400. Selon une étude Astredhor (3), le prix moyen d'une serre verre est de 107 € HT/m2, 59 € pour une serre plastique double paroi gonflable et 47 € pour une simple paroi...

Sur une structure existante, un moyen efficace de limiter les déperditions de chaleur est d'installer un écran thermique. Selon le CTIFL, l'utilisation d'un double écran thermique (éligible au CEE) entraîne 12 % d'économie supplémentaire par rapport à un simple écran. Avec un écran thermique latéral (éligible au CEE), l'économie est un peu moindre (4 %). Le prix moyen d'un double écran thermique est de 29 € HT/m2 (pour environ 0,5 ha).

4. GESTION DU BALLON DE STOCKAGE. « La gestion du ballon de stockage en open buffer permet le découplage total de la production de chaleur et de sa distribution dans la serre », explique Raphaël Tisiot. Le fonctionnement du brûleur à régime constant faible optimise le rendement de combustion. L'open buffer permet d'écrêter les pics de consommation de combustible et présente un intérêt particulier pour les chaudières à biomasse. Son prix moyen est de 380 € HT/m3. Un tel procédé permet 10 % d'économie d'énergie et est éligible au CEE.

5. RELOCALISATION DES RÉSEAUX DE CHAUFFAGE. L'installation du réseau de chauffage au sein de la végétation permet de chauffer la plante plutôt que l'air de la serre. Cette solution, éligible au certificat d'économie d'énergie, complète bien l'ajout d'un écran thermique et l'intégration des températures, autorisant jusqu'à 10 % d'économie d'énergie. Un réseau de chauffage localisé basse température coûte en moyenne 13 € HT/m2.

6. AÉRER DIFFÉREMMENT. Différents dispositifs aérauliques promettent des économies d'énergie. Les échangeurs double flux air/air avec réchauffage de l'air possible, qui ont été testés au Comité d'action technique et économique (Caté), ont permis 20 % d'économie.

Le système de ventilation active (AVS) est testé sur le centre CTIFL de Carquefou (44). Le dispositif consiste à mélanger l'air intérieur avec de l'air extérieur plus sec et à réinjecter ce mélange dans la serre.

Le CTIFL étudie également cette année le Ventilated Latent Heat Converter (AGAM), basé sur l'utilisation d'un sel hygroscopique, le chlorure de lithium, captant l'humidité de l'air. Son développement est significatif en Europe avec plus de 300 unités installées à ce jour principalement en serre horticole.

7. COGÉNÉRATION ET ÉNERGIES ALTERNATIVES. Le recours à la co-génération ou à la micro-cogénération comme aux énergies alternatives s'étudie au cas par cas, selon le profil de consommation de la serre (chauffage basse température ou non, pics de besoins...), les opportunités géographiques (approvisionnement en biomasse, réseau de chaleur industrielle ou urbain, site de méthanisation...), le prix de rachat de l'électricité (photovoltaïque, cogénération), le prix d'achat du gaz...

Le changement d'énergie nécessite au préalable une étude de préfaisabilité. Ces solutions alternatives sont : le chauffage biomasse, les pompes à chaleur air/eau ou eau/eau (éligible au CEE), le raccordement de la serre à un réseau alimenté par de l'énergie issue de process industriel (éligible au CEE), le biogaz, la géothermie, le couplage à des panneaux photovoltaïques ou encore le chauffage solaire. Le Ratho, qui étudie depuis plusieurs années cette dernière solution avec des résultats intéressants, a développé avec le bureau d'études Agrithermic un procédé appelé Agrichauff. Les deux partenaires travaillent actuellement sur un procédé d'aérotherme solaire.

Valérie Vidril

(1) Liste des opérations standardisées éligibles au CEE disponible sur : https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/operations-standardisees#e4 (2) Toutes les estimations d'économie d'énergie indiquées dans cet article sont issues du CTIFL. (3) « Coûts moyens de quelques équipements en horticulture ornementale entre 2011 et 2014 », septembre 2014. Tous les coûts indiqués dans cet article sont issus de ce document.

Le positionnement du réseau de chauffage au plus près des plantes est une mesure efficace d'économie d'énergie.

Un écran thermique entraîne 4 à 12 % d'économie d'énergie, selon qu'il est simple ou double, d'après le CTIFL.

Le confinement de la serre pour limiter les pertes d'énergie nécessite une bonne gestion du climat et de l'hygrométrie, éventuellement à l'aide d'un déshumidificateur.

L'air chaud au faîtage peut être récupéré et stocké dans des bidons d'eau ; la chaleur est restituée durant la nuit.

Pour une optimisation maximum, le capteur de température devra être positionné au plus près des végétaux.

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